[Les terrasses de riz de Longji se trouvent à environ 65 kilomètres du centre-ville de Guilin. Avec la route sinueuse, il faut compter plus de 2 heures d'autobus pour s'y rendre, et ce, lorsque la route est praticable!]

Des pluies torrentielles avaient créé des glissements de terrain un peu partout dans le sud de la Chine. Cette partie du pays avait été paralysée pendant quelques jours en raison des caprices de Dame nature qui avaient eu comme résultats de rendre certaines routes dangereuses, voire même impraticables. Notre séjour dans ce coin de pays s’annonçait être plutôt décevant dans ce contexte. En effet, notre présence dans cette contrée lointaine était en grande partie due à la présence de villages reculés en région montagneuse. La fermeture des chemins d’accès y menant bousillait ainsi nos plans et du même coup notre espoir d’accéder à ces endroits mythiques.

Par la plus grande chance, le chemin principal pour atteindre les montagnes avait été nettoyé la journée avant notre départ. Nous avons donc eu la chance d’y aller. Il faut savoir que, même en temps normal, l’accès à ces villages est plutôt difficile. Une petite route de montagne sinueuse à une seule voie est l'unique chemin pour y accéder.  Les chauffeurs qui l’empruntent sont relativement aguerris et vont klaxonner à chaque tournant pour signaler à une éventuelle voiture arrivant dans le sens inverse leur présence. Sur un trajet d’environ 50 kilomètres qui nous a pris un bon trois heures, notre chauffeur a dû klaxonner environ 1000 fois. Même lorsqu’on n’est pas un habitué du mal des transports, ce parcours vous donne une bonne raison de faire une exception.

Un vieux village nous attendait au haut de la montagne. Des maisons en bois sur pilotis y sont perchées. Il n’y a aucune route, aucune voiture ni même de l'électricité dans ce village. Le 21e siècle avec toutes ces avancées technologiques s’arrête au même endroit que la fameuse route sinueuse par laquelle nous sommes arrivés, offrant au passage un retour dans le temps à n'importe quel voyageur ayant le cran de s'y rendre.

Les maisons, avec leur toit de pailles, étaient encerclées par des champs de riz. Des petits nuages de fumée s'échappaient des cheminées de la plupart des maisons observables. C'était l'heure du dîner et une délicieuse odeur de riz flottait dans l’air. Nous avons entamé notre montée dans le village en empruntant le petit sentier que les locaux utilisent probablement plusieurs fois par jour. Les fameuses terrasses de riz n'étaient toujours pas observables de l'endroit où nous nous trouvions, elles sont situées de l’autre côté du village, sur le flanc opposé de la montagne. Pour aller les observer, il fallait traverser le village au complet en chevauchant les différentes maisonnées. Les locaux nous saluaient au passage, une pointe de gêne sur leur visage bienveillant.

Puis, arrivés au sommet, nous avons pu les observer. Le décor des rizières en terrasses était à perte de vue, j’aurais pu m'y noyer. Le voyage sur la route mortelle en valait la chandelle. Les champs de riz étaient partout dans la montagne. Le reflet du soleil dans l’eau qui les baignait faisait scintiller le décor. Nous étions bouche bée, nous étions sous le charme. Un des plus beaux décors que j'ai eu la chance d'admirer de ma vie.

Nous n'étions pas encore remis de notre découverte qu'un petit chinois nous a tapotée sur l’épaule. Il voulait une photographie, de nous. Le décor lui importait peu. La véritable merveille en ces lieux, à ces yeux, c'était nous. Deux blancs aux yeux bleus. Pour lui, nous étions des vedettes d’Hollywood, au même rang que ceux qu’ils voient à l’occasion dans les rares films américains qu’il a eu la chance de regarder. Dans certaines parties de la Chine, surtout celles qui sont plus reculées, les Chinois ne voient pratiquement jamais de touristes. Nous étions l’exception et il voulait s’assurer d’immortaliser ce moment. Nous avons accepté avec humour.

Après quelques heures à apprécier l’endroit, nous avons finalement entamé notre descente, sachant que le retour à la ville ne serait pas de tout repos. Nous sommes repartis avec l'esprit léger et une caméra bien remplie. L'attente avait valu la peine.